LES EXCENTRIQUES
ARTHUR CRAVAN - INTRO ET SOMMAIRE
Arthur Cravan
Calaca
Disparition

FABIAN LLOYD
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CALACA
VIVANT

 

LA DISPARITION

"J'ai scruté chaque visage - il n'en est plus au monde un seul comme celui de Cravan."
Mina Loy

Lorsque Mina rejoint Cravan à Mexico City, il tente de gagner sa vie à la force de ses poings. Travaillant comme professeur de boxe à l'Escuela des Cultura Fisica Sandow, il livre aussi quelques combats: contre Honorato Castro le 9 aout 1918 et contre le champion de la République du Mexique Jim "Black Diamond" Smith le 15 septembre 1918. Il perd les deux rencontres.

En avril 1918, Mina et lui se marient. Ils habitent une chambre affreuse dans une rue où sont assises "des vieilles sorcières enveloppées dans de sombres et raides étoffes" ("Colossus"). Même si au Mexique, comme le constate Cravan, "la vie est très bon marché: la chambre et les trois repas par jour soixante quinze cents. évidemment que ce n'est pas luxueux."(Lettre à Mina Loy), elle est déjà trop chère pour le couple de poètes qui connaît, comme à New York, la misère et la faim et survit difficilement, des quelques combats livrés par Cravan et des talents de blanchisseuse de Mina. Ils font de longues promenades bras dessus, bras dessous dans Mexico, contemplent les boîtes de conserve dans les épiceries et se nourrissent de tomates.

  VERA CRUZ (all rights reserved)
 
Vera Cruz (all rights reserved)

Mina persuade Arthur de partir pour Buenos Aires. L'argent du match contre Jim Smith, 2000 pesos, leur permet de quitter Mexico et gagner Vera Cruz où ils comptent s'embarquer pour l'Argentine.

On évoque dans la presse mexicaine un possible match revanche du "combattant suisse" contre Jim Smith à Vera Cruz mais, sans que l'on sache pourquoi, Arthur et Mina quittent Vera Cruz. Ils traversent le Mexique, gagnant de quoi manger et se loger grâce à de petites représentations théâtrales improvisées.

Cravan perd du poids, ce qui le rend encore plus séduisant aux yeux de Mina: il "avait l'air si beau quand son visage s'était amaigri." (Lettre à Nellie Lloyd). La transformation de l'homme en ange se fait autant au physique qu'au moral.

Quand ils arrivent à Salina Cruz, sur la côte du Pacifique, Mina Loy est enceinte. Faute d'argent pour acheter deux passages, et de peur que Mina ne fasse une fausse couche, Cravan décide qu'elle partira la première pour Buenos Aires. Il la rejoindra plus tard. Elle embarque sur un navire hôpital japonais.

Le 3 septembre, Cravan écrit à sa mère qu'il quitte le Mexique dans dix jours et qu'elle lui écrive à la poste restante de Buenos Aires.

Le 11 novembre 1918, la guerre prend fin.

A Buenos Aires, Mina attend toujours. Chaque jour elle se rend à la poste chercher une lettre qui n'arrivera jamais.

Mina écrit à Nellie Lloyd, le 9 décembre 1918, pour l'avertir de la disparition de son fils et demander qu'on lui envoie une copie des documents d'identité de Fabian dont elle aura besoin à la naissance de son enfant.

Nellie pense d'abord "C'est un tour à Fabian pour s'en débarrasser à jamais." (Lettre à Otho). Soupçonnant Mina de vouloir lui soutirer de l'argent, elle ne répond pas aux lettres de la jeune femme qui espère des nouvelles de son mari.

Fin 1918, pourtant, Nellie s'est résignée à la mort de son fils: "Mina a maintenant la quasi certitude que notre pauvre cher Fabian aura trouvé la mort, noyé dans le Pacifique. Fabian nous avait habitué depuis longtemps à sa mort car longtemps avant qu'il avait cessé de vivre, volontairement il avait décidé d'être mort pour nous 'pauvres petits bourgeois mesquins'" (Lettre à Otho)

Sans nouvelles de son mari, Mina regagne l'Angleterre. Le 5 avril 1919, elle met au monde une petite fille qu'elle baptise Fabienne.

Deux ans plus tard, elle écrit à Nellie: "Ces dernières semaines ont été la véritable époque de deuil profond. Tant qu'il y a espoir, il est très facile d'être courageux. Mais je sais maintenant que ma misérable vie a sombré avec mon mari dans le Pacifique."

Au bout de quatre ans de poursuite, la mort a rattrapé Arthur Cravan et Mina a perdu son âme soeur pour toujours.

© Emmanuel Pollaud-Dulian
(Paris - octobre 1998)

Le Mexique d'Arthur Cravan.

CALACA

 

 

 
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