LES EXCENTRIQUES
ARTHUR CRAVAN - INTRO ET SOMMAIRE
Arthur Cravan
Amour
Mina Loy

 

MINA LOY (all rights reserved)
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Mina Loy
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MINA LOY

"Chercher l'amour avec toutes ses catastrophes est une expérience moins risquée que de le trouver."
Mina Loy.

Mina Gertrude Lowy naît à Londres le 27 décembre 1882. Elle est la fille d'une mère chrétienne, Julia, et d'un père juif, Sigmund. Fuyant l'Angleterre victorienne, elle étudie l'art à Munich. Revenue à Londres, elle rencontre Stephen Haweis, qu'elle suit à Paris et épouse en 1903. Le couple fréquente le milieu littéraire et artistique, rencontre Brancusi, Man Ray, Tristan Tzara, Picasso, Apollinaire. En 1905, la jeune femme expose ses toiles au Salon d'Automne, sous le nom de Mina Loy.

Le couple s'installe ensuite à Florence où Mina met au monde deux enfants: Joëlla et Giles. Stephen l'abandonne peu après. Il ira d'abord aux îles Fidji puis en Australie. Mina obtiendra le divorce en 1917.

Restée seule à Florence, Mina continue de peindre et écrit des poèmes érotiques ou satiriques. Elle devient l'égérie du Mouvement Futuriste et ses toiles figurent à la Première exposition Internationale Libre d'Art Futuriste à Rome.

Une situation financière précaire la pousse en octobre 1916 à s'embarquer pour les Etats-Unis, laissant ses enfants à Florence. Elle arrive à New York trois mois avant Cravan.

La communauté artistique new yorkaise l'adopte aussitôt. On la décrit en février 1917 comme le prototype de la Femme Moderne. Elle déborde de projets, écrit, peint, dessine des costumes, joue la comédie.

Survient la rencontre avec Cravan, qui va bouleverser sa vie. Il lui apparaît d'abord comme un bloc de granit, dépourvu de tout magnétisme, puis le charme opère. Les deux exilés ont beaucoup en commun, à commencer par la pauvreté et le goût des voyages. Mina est aussi protéiforme dans son art que Cravan dans sa vie, peignant, dessinant, écrivant, assemblant des objets ramassés dans les rues et les poubelles de Manhattan pour en faire des sculptures, des lampes, des collages. Comme lui elle chérit ses propres contradictions, qu'elle considère non comme des obstacles à vaincre, mais comme des facettes de son génie. Ce sont deux anticonformistes, qui vivent en marge, indifférents aux règles sociales, aux convenances. Ils sont faits l'un pour l'autre. "Plus j'y pense, écrit Cravan, plus je vois qu'il est absolument logique que nous nous retrouvions. Nous avons les mêmes goûts et je ne crois pas que dans cent ans je puisse retrouver une femme comme toi." ("Lettre à Mina")

  L'amour dorloté par les belles dames, 
dessin et gouache de M.Loy (all rights reserved)
 
"L'amour dorloté par les belles dames",
dessin et gouache de M.Loy
(all rights reserved)

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Beaucoup de gens se sentent mal à l'aise en présence de Mina parce qu'elle même se sent mal à l'aise avec eux. Certains la jugent même déséquilibrée. Or la présence de Cravan à ses côtés, lui semble toute naturelle, évidente. Avec lui, elle se sent bien. Il est pour elle comme le balancier du funambule.

Ils marchent sans but à travers New York, comme ils marcheront à travers Mexico, les pas de Mina accordés aux grandes enjambées de Cravan: "Nos errances (...) étaient devenues infatigables et sereinement intercommunicatives." ("Colossus"). Ils visitent le zoo, s'asseyent sur un banc. Mina, qui considère la Bible comme le Livre de Vérité, en fait la lecture au poète - pugiliste.

Lui, dont elle disait qu' il "ne voulait même pas entendre parler de civilisation. Le mot progrès le faisait s'étouffer de rire.", se civilise à son contact. "Il ne fouillait plus dans les sacs des dames, ne posaient plus ses pieds gigantesques sur leurs jupes." ("Colossus") Contrairement à Cendrars ou Duchamp, et comme Renée, Mina voit au-delà de l'escroc, du provocateur, du goujat; elle découvre en Cravan un être extraordinaire, singulier, unique. Et celui-ci se met en tête de justifier l'amour que lui porte Mina et de devenir ce "dieu" qu'elle voit en lui. Pour elle, il se met à lire: "Je vais tous les jours à la bibliothèque et je m'en donne à coeur joie avec les génies. elle est très bien montée en livres français. Je me développe toujours." ("Lettre à Mina"). Pour elle, à ses âmes de poète, de boxeur, de voleur, il ajoute celle du saint: "Tu es mon idéal absolu. Tu verras mes actes. Ne dis pas que ce ne sont que des promesses. Je te dis que je suis devenu un Saint." (Lettre à Mina")

Après la disparition de Cravan au Mexique, et la naissance de leur fille Fabienne en Angleterre, Mina Loy retourne à Florence où elle élève ses enfants. Elle tente en vain de se rapprocher de la famille de son mari.

Puis elle revient en France avec Fabienne. En 1923 elle publie à Dijon un recueil de poèmes en vers libres, "Lunar Baedecker". Si Ezra Pound admire ces poèmes pour leur ironie et leur refus du sentimentalisme, si elle influence d'autres poètes comme William Carlos Williams, Hart Crane ou e.e. cummings, les "tremblements tentaculaires" de son écriture déroutent les lecteurs ordinaires.

Elle entreprend de raconter sous le titre de "Colossus" les années passées avec Cravan mais n'achève pas le livre. Elle continue de dessiner des bijoux et des abat-jour, aidée par sa fille. Peu à peu, durant les années trente, elle s'efface de la scène publique On l'oublie. A l'approche de la guerre, elle envoie Fabienne à New York où elle vit chez sa soeur Joella qui a épousé Julien Levy.

En compagnie de sa mère, Fabienne ouvre un atelier à New York où elles créent bijoux et abat-jour.

Joella d'abord puis Fabienne et Mina s'établissent au cours des ans dans le Colorado, à Aspen.

Mina y meurt le 29 septembre 1966.

Fabienne, qui avait hérité de son père le goût de la plaisanterie et du déguisement, vécut jusqu'en 1997. Ayant perdu son mari et devenant aveugle, elle choisit de ses suicider en mai.

En 1928, un journaliste demande à Mina Loy:
"Quels ont été les moments les plus heureux de votre vie?
- Chaque instant que j'ai passé avec Arthur Cravan.
- Et les plus malheureux?
- Tout le reste du temps."

© Emmanuel Pollaud-Dulian
(Paris - octobre 1998)

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